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Les Lettres françaises
Image illustrative de l’article Les Lettres françaises

Pays Drapeau de la France France
Langue Français
Périodicité Mensuel, sur abonnement
Genre Littérature
Prix au numéro 1,40 
Fondateur Jacques Decour
Jean Paulhan
Date de fondation 20 septembre 1942
Ville d’édition Paris

Directeur de publication Franck Delorieux
Directeur de la rédaction Franck Delorieux
Rédacteur en chef Jean-Pierre Han
ISSN 0024-1393
Site web editionshelvetius.com/llf/

Les Lettres françaises est une publication littéraire créée en France, en pendant l'Occupation, par Jacques Decour et Jean Paulhan.

C'est l'une des nombreuses publications du mouvement de résistance Front national : il s'agissait alors d'une publication clandestine bénéficiant entre autres des collaborations de Louis Aragon, François Mauriac, Claude Morgan, Édith Thomas, Georges Limbour, Raymond Queneau et Jean Lescure.

Après la Libération, de 1953 à 1972, Les Lettres françaises, dirigées par Louis Aragon, bénéficient du soutien financier du Parti communiste français (PCF).

Repères historiques

La rivalité avec Action

Après la guerre, Les Lettres françaises subit la forte concurrence d'un hebdomadaire au rayonnement littéraire et politique important, le journal Action, dont le rédacteur en chef, Pierre Hervé, entre en conflit avec Louis Aragon. Leur conflit pousse le PCF à désigner un nouveau directeur d'Action en 1949, ce qui contribue au déclin de ce journal, qui disparaît en 1952.

L'affaire Lyssenko

À la suite de l'institutionnalisation du lyssenkisme par Staline (lors de la session de l'Académie Lénine des sciences agricoles de l'URSS, du 28 juillet au 7 août 1948), Les Lettres françaises publie un article de Jean Champenois (26 août) pour fêter la victoire du lyssenkisme. Le 30 septembre, Aragon y défend la même position, et s'inquiète de la mollesse et des ambigüités dont font preuve certains intellectuels communistes dans la dénonciation de la génétique mendélienne, puis coordonne en octobre un double numéro de la revue Europe entièrement consacré à l'affaire Lyssenko.

Pour tenter de répondre aux interviews de trois biologistes français publiés dans Combat (Jean Rostand et Jacques Monod, franchement hostiles au lyssenkisme, et Marcel Prenant, qui tente de trouver un compromis), Les Lettres françaises publie encore deux articles consacrés à la célébration de la nouvelle science soviétique (en novembre et décembre) par deux biologistes notoirement incompétents en génétique, Gaston Baissette et Jeanne Lévy), tandis que Claude Gregory consacre un article le 9 décembre aux prises de position de « Trois savants français » (Jeanne Lévy, Victor Nigon, Paul Dommergues) lors du Comité national des écrivains[1].

L'affaire Kravtchenko

En 1949 aussi, une polémique puis un procès retentissant opposent le journal au dissident soviétique Victor Kravtchenko. Après la parution de son livre J'ai choisi la liberté, parlant des camps de prisonniers en URSS et de leur exploitation, Les Lettres françaises l'accuse de désinformation et d'être un agent des États-Unis à partir de faux documents écrits par le journaliste André Ulmann qui travaille pour les services de renseignement soviétiques. La vérité sur l'origine de ces documents ne sera connue qu'à la fin des années 1970. La décrédibilisation de la personne de Kravtchenko dans la revue a pour but de minorer la portée de son témoignage[2].

Kravtchenko porte plainte contre Les Lettres françaises pour diffamation, et nommément contre Claude Morgan, directeur, et André Wurmser, rédacteur[2]. Le journal est défendu par l'avocat Joë Nordmann.

Le procès, surnommé le « procès du siècle », a lieu en 1949 et regroupe une centaine de témoins. L'Union soviétique présente les anciens collègues de Kravtchenko et son ancienne femme pour le dénoncer. Les défenseurs de Kravtchenko amènent à la barre des survivants de camps de prisonniers ; parmi eux Margarete Buber-Neumann, la veuve du leader communiste allemand Heinz Neumann (en lien avec les protocoles secrets du pacte germano-soviétique, alors qu'elle purgeait une peine de camp depuis deux ans, elle avait été remise par les autorités soviétiques à la Gestapo qui l'avait internée au camp de concentration de Ravensbrück).

Le procès est remporté par Kravtchenko en qui reçoit une somme symbolique en réparation de cette diffamation.

Après la sortie en 1947 du livre de Victor Kravtchenko, David Rousset, résistant et ancien déporté crée en la Commission internationale contre le régime concentrationnaire (CICRC), qui entreprend des enquêtes sur les situations espagnole, grecque, yougoslave et soviétique. Pour la première fois en France, il utilise le terme de Goulag pour désigner le système concentrationnaire soviétique. Ceci lui vaut d'être traité de « trotskiste falsificateur » par Les Lettres françaises, à qui il intente un procès en diffamation[3], qu'il gagne[4].

Affaire du portrait de Staline

En 1953, la revue se trouve au centre de l'affaire du portrait de Staline : à la mort de celui-ci, elle publie en couverture un portrait réalisé par Picasso. L'œuvre est décriée par le monde communiste, ce qui amène la revue à faire son autocritique — c'est un tournant dans les liens entre monde artistique et communisme.

Arrêts et reparutions

Dans les années 1960, Les Lettres françaises contribue au débat littéraire et artistique, notamment par les chroniques que Michel Mardore et Georges Sadoul y consacrent au cinéma.

À cause de la prise de position du journal contre l'invasion de la Tchécoslovaquie en , l'URSS cesse de souscrire ses nombreux abonnements au profit de ses universités, écoles et bibliothèques. Cette décision est fatale à la revue : sa parution cesse en 1972, le soutien du PCF ne pouvant compenser cette perte des ventes dans les pays de l'Est de l'Europe.

Entre 1990 et 1993, la revue est à nouveau publiée de manière mensuelle.

Après une nouvelle interruption, elle paraît sous la forme d'encart mensuel dans L'Humanité à partir de [5]. À partir du mois d', Les Lettres françaises paraît chaque premier jeudi du mois. Le , la revue cesse de paraître sous sa forme papier et n'est plus publiée que sur Internet.

Le , à l'occasion des 75 ans du journal, Jean Ristat annonce sa reparution en version papier pour le début de l'année 2018[6] avec une périodicité mensuelle.

Après le décès de Jean Ristat, le 2 décembre 2023, le poète Franck Delorieux devient le nouveau directeur de la publication de la revue[7].

Directeurs

Chroniques

Actuellement composé de seize pages mensuelles, Les Lettres françaises se compose :

  • d'une « une » illustrée par une œuvre d'art contemporaine ;
  • d'un dossier ;
  • des pages « Arts », Lettres, « Musique », « Patrimoine », « Savoir » et « Théâtre » ;
  • d'inédits d'écrivains ou de poètes.

Collection « Les Lettres françaises »

« Les Lettres françaises » est aussi le nom d'une collection littéraire publiée à l'origine par les éditions du Mercure de France. La collection est publiée, entre 2010 et 2021, par les éditions Le Temps des cerises[8] puis par les éditions Manifeste ![9]. La collection comporte actuellement les ouvrages suivants :

Notes et références

  1. Uztopal Deniz, « La réception en France du lyssenkisme, les scientifiques communistes français et la conceptualisation de la "science prolétarienne" (1948-1956) », Cahiers d'histoire. Revue d'histoire critique, n° 122,‎ , p. 121-141 (lire en ligne).
  2. a et b Liora Israël, « Un procès du Goulag au temps du Goulag ? L'affaire Kravchenko (1949) », Critique internationale, 2007/3 (n° 36), pages 85 à 101.
  3. Frédéric Verger, « Les lumières et le goulag » dans la Revue des deux Mondes, no 1, janvier 2011, p. 133.
  4. « La traversée du goulag », la-croix.com, 24 novembre 2010.
  5. « Comment renaît un journal et pourquoi », Les Lettres françaises, 19 mars 2004. À lire sur le site Internet.
  6. « Les Lettres françaises, retour vers le papier », Le site du journal,‎ (lire en ligne, consulté le ).
  7. Les Lettres françaises, n° 226/60, décembre 2023.
  8. Voir encadré dans Les Lettres françaises, page 11.
  9. a et b « De la main gauche - Serge Fauchereau », sur editionsmanifeste.fr (consulté le ).
  10. François Esperet sur data.bnf.fr.
  11. Victor Blanc sur data.bnf.fr.
  12. « Le Corps écrit », sur letempsdescerises.net (consulté le ).
  13. « Filigrane'l », sur letempsdescerises.net (consulté le ).
  14. « Proz’ & Po ̈m », sur editionsmanifeste.fr (consulté le ).

Voir aussi

Bibliographie

  • Georges Aillaud, François Eychart, Les Lettres françaises et Les Étoiles dans la clandestinité, 1942-1944, Le Cherche midi, 2008 (ISBN 978-2749112299).
  • Pierre Daix, Les Lettres françaises, jalons pour l'histoire d'un journal, 1941-1972, Tallandier, 2004.
  • Robert O. Paxton, Olivier Corpet, Claire Paulhan, Archives de la vie littéraire sous l'Occupation, À travers le désastre, Éditions Taillandier et les Éditions de l'IMEC, 2009, 448 p. (ISBN 978-2-84734-585-8).
  • Guillaume Roubaud-Quashie (dir.), Les Lettres françaises. Cinquante ans d'aventures intellectuelles. Anthologie depuis 1942, Paris, Hermann, 2019, 1026 p. (ISBN 979-1-0370-0164-1).

Articles connexes

Liens externes