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Le système phonologique décrit ici est celui de l'arabe classique « théorique » ; l'arabe, en effet, n'est pas prononcé uniformément d'un pays à l'autre, tant s'en faut. Les faits de langues concernant les prononciations dialectales seront cependant signalés. Ces différences se retrouvent dans les différents cours et vidéos en ligne disponibles[1],[2],[3]. Pour une description de l'alphabet et des règles d'écriture, consulter Alphabet arabe.
L'arabe est une langue sémitique, type de langue pour lequel les consonnes sont fondamentales. La sémantique est avant tout portée par le squelette formé par les consonnes des mots ; de leur côté les voyelles sont peu variées et indiquent, par rapport à ce squelette de consonnes, des variations grammaticales, ou des variations sémantiques au sein d'une même famille de mots. Ceci explique que les voyelles faibles peuvent souvent être élidées dans le discours parlé, que ce soit à l'intérieur des mots, ou dans les suffixes grammaticaux. Mais inversement, ces voyelles même faibles sont fondamentales pour comprendre la grammaire et l'orthographe de l'arabe classique.
Même si la consonne est fondamentale sur le plan sémantique, cette « articulation » qu'elle fournit sur le plan phonétique ne peut exister qu'en étant « mise en mouvement » par une voyelle, dont l'existence est souvent implicite dans les langues à alphabet consonantique, mais qui n'en sont pas moins indispensables à la prononciation :
De base, la syllabe arabe se compose ainsi pour l'oral de deux éléments fondamentaux :
Dans ce système essentiellement consonantique, il ne peut pas y avoir de voyelle « nue » ; une voyelle se rattache toujours à une consonne initiale. Ensuite, la voyelle étant émise, elle peut s'éteindre sans complément, ou au moyen d'une « consonne » secondaire servant d'arrêt ou de complément. L'arabe distingue ici entre les « syllabes courtes », formées simplement par une consonne et une voyelle, et les « syllabes longues », qui sont fermées par une « consonne » secondaire. En outre, une syllabe peut être « longue » parce que la voyelle émise porte elle-même un accent de durée.
Les syllabes en arabe seront finalement de trois types :
La syllabe « fermée », ou « artificielle », est formée d’une consonne, de la voyelle attachée, et d’une autre consonne qui ne porte aucune voyelle mais un signe (ــْـ) nommé « djezma » (جَزْم), dont le nom signifie séparation ou césure. On le nomme aussi soukoun (سـُكـُون), c’est-à-dire repos. Une lettre marquée d’un djezma est dite « en repos » ou « quiescente »[4]. De ce fait, dans l’enchaînement de syllabes, le djezma ne reflète pas réellement la succession de deux consonnes, mais bien l’enchaînement d’une syllabe fermée avec la suivante : « djezma » est formé de deux syllabes « djez-ma » séparés par une césure ou un repos. Le djezma peut être considéré comme le signe d’une voyelle intercalaire très brève. Lorsqu’une consonne marquée d’un djezma (ــْـ) est suivie d’un son simple, c’est-à-dire d’un alif hamzé ٲ mû par une voyelle, il ne faut pas joindre le son avec la consonne qui le précède, mais il faut le prononcer comme s’il y avait, après cette consonne, un « e » très bref. Ainsi les mots قـُرْءَان, يَسْأَلُ, شَيْـًٔا, doivent être prononcés kor-ânon, yés-alou, schéy-an, et non pas ko-rânon, yé-salou, sché-yan.
La structure syllabique stricte de l'arabe, strictement limitée à ces trois types de syllabes, impose des contraintes sur l'écriture et la grammaire :
Les mots qui commencent apparemment par une voyelle sont en réalité mis en mouvement par une consonne minimale dite « attaque vocalique » ou « occlusive glottale », consonne faible voire très faible, notée hamza (ــٔـ). Cette « attaque vocalique » est en français celle qui fait la différence entre « océane » (sans attaque) et « oh ! c'est Anne » (avec une réattaque vocalique devant « Anne » si on le prononce sans liaison). C'est le même son qui est prononcé en allemand devant une voyelle initiale et que les germanophones appellent Knacklaut.
De même, lorsqu'à l'intérieur d'un mot deux voyelles se font suite, elles sont toujours séparées par une hamza (ــٔـ) qui impose une diérèse, et décompose cette association en deux syllabes, séparées par la consonne faible de réattaque vocalique. Cette diérèse est plus marquée que celle qui en français fait la différence entre « poète » et « pouet ».
Il y a beaucoup de rapport entre la prononciation du ‘ain ع et celle du hamza ء, si ce n’est que le ع s’articule plus fortement. La figure même du hamza ء, qui n’est autre chose qu’un petit ‘ain ع, indique cette analogie[5]. Toutefois le ‘ain est une consonne voisée, fricative putôt qu'occlusive, dont le son est très proche de celui du « r anglais ».
Une consonne sans voyelle, notée par un sukun (ــْـ), ne peut se présenter qu'en fin de syllabe et derrière une voyelle courte. Il ne peut donc pas y avoir deux consonnes consécutives portant un sukun (ــْـ).
Un mot ne peut pas commencer par deux consonnes sans voyelle intermédiaire, comme en français pour le mot « spécial ». Lorsque cette configuration se présente (notamment à l'impératif), l'arabe rajoute systématiquement devant les deux consonnes une voyelle épenthétique courte (comme en français dans la prononciation « espéciale »), et cette voyelle doit elle-même être portée si nécessaire par une hamza instable. Dans les mots d’origine étrangère au commencement desquels il se trouve deux consonnes de suite, l’arabe ajoute avant la première un alif ا mû le plus souvent par un kesra (ــِـ) : c’est ainsi que du mot grec κλίμα / klíma, « inclinaison (du ciel) » s'est formé le mot إِقْلــِـيم, et qu’en français les mots « esprit » et « écrire » dérivent du latin spiritus et scribere[6]. Par la même raison, dans la prononciation vulgaire, où la voyelle de la première syllabe d’un mot est souvent supprimée, on ajoute au commencement de ce mot un اِ (alif avec un kesra), lettre qui ne s’écrit pas mais qui se prononce[7].
Les déclinaisons sémantiques forment fréquemment des termes dérivés au moyen d'un shadda (ــّـ), généralement interprétée comme un signe de gémination de la consonne. Cependant, il ne s'agit pas d'une « consonne double » ouvrant ou fermant une syllabe, puisqu'un shadda est l'équivalent d'une duplication de la consonne sans voyelle intermédiaire. Une consonne portant un shadda (ــّـ) ne peut donc se présenter qu'en fin de syllabe, et derrière une voyelle (normalement courte, mais il y a quelques exceptions). L'interprétation d'un shadda (ــّـ) est qu'il vient allonger la syllabe précédente en la fermant par une duplication de la consonne suivante. Dans le découpage syllabique, les deux occurrences de cette consonne appartiennent à des syllabes différentes, et un mot comme مُدَرِّسَة (mudarrisah, enseignante) se décompose en mu-dar-ri-sah.
Une lettre de prolongation fermant une syllabe, elle ne peut pas être suivie d'un sukun (ــْـ), ni d'un shadda (ــّـ) sauf cas particulier. Ce concours n’a lieu après une lettre de prolongation qu’au duel et au pluriel de l’aoriste et de l’impératif énergique, dans la onzième conjugaison et dans les dérivés des verbes sourds[8] ; quand de ces deux lettres, la première est une lettre de prolongation (c’est-à-dire un ا après un fatha (ــَـ), et théoriquement un و après un dhamma (ــُـ), ou un ي après un kesra (ــِـ)), que ces deux lettres ne sont pas radicales, et que la seconde est une consonne non écrite mais signalée par un teschdid (ــّـ)[9], comme dans les mots مَادٌّ ou دَالٌّ.
Les trois « lettres faibles » sont ya ﻱ, qui correspond au « i » ; waw ﻭ qui correspond au « u », et alif ﺍ qui correspond au « a ». Ces lettres ا, و, ي, s’appellent « infirmes » parce qu’elles sont sujettes à diverses permutations que les grammairiens arabes regardent comme une espèce d’infirmité[10].
La « lettre faible », quand elle est un ya ﻱ ou un waw ﻭ, peut également jouer le rôle une consonne. En tant que consonne, la « lettre faible » correspond à la semi-voyelle Y pour ya ﻱ et W pour waw ﻭ. Il n'y a en effet pas de solution de continuité entre l'articulation faible d'un « i » et celle plus marquée d'un « y », ni entre le « ou » et le « w », de même qu'en français entre « l’iode » et « le yod ». En revanche, alif ﺍ n'est pas une consonne, et ne peut servir que de lettre de prolongation ou de support de hamza.
Mais la présence dans le squelette radical d'une semi-consonne —qui reste en même temps une semi-voyelle et reprend parfois son rôle de prolongation— induit des contraintes phonétiques et orthographiques. Ces lettres radicales particulières conduisent à des conjugaisons irrégulières, verbes « assimilés » dont la première radicale est un و, verbes « concaves » dont la deuxième radicale est une lettre faible, et verbes « défectueux » dont la troisième radicale est faible.
On évite avec le plus grand soin la rencontre des sons dhamma (ــُـ) et kesra (ــِـ), ainsi que des articulations waw (و, W) et ya (ي, Y), et réciproquement. Ils sont incompatibles entre eux. Dans les cas très-fréquents où cette rencontre a lieu, celui des deux sons incompatibles qui est le moins important pour la forme du mot se supprime, et quelquefois se change en l'autre. Le waw (و, W) et le ya (ي, Y) se contractent ensemble quand ils ne peuvent se supprimer : ils se réunissent alors par le teschdid (ــّـ)[12].
Il faut bien distinguer le و et le ي de prolongation, des mêmes lettres djezmées (ــْـ). Le و et le ي de prolongation ne doivent pas être marqués d’un djezma (ــْـ), non plus que l’alif bref ou le ى qui le remplace. Lorsque le و et le ي sont marqués d’un djezma (ــْـ), ils doivent conserver leur valeur dans la prononciation. Le و dans ce cas forme en principe une diphtongue avec la voyelle qui le précède, par exemple يَوْمٌ prononcé ya-u-mun (ce qui ne diffère pas tellement de yaw-mun). Le ي dans le même cas doit se prononcer avec la voyelle qui le précède, par exemple أَيْدـِـى se prononcera ay-di. Dans le langage vulgaire, toutefois, le و quiescent après un fatha (ــَـ) se prononce le plus souvent comme « au », et le ي dans le même cas comme notre « ê ». On aura ainsi par exemple يَوْم yaum plutôt que ya-oum, et أَنْسَيْتُ ansêtou ou ansêt plutôt que ansaytou[13].
Les phonèmes, le cas échéant, sont notés par paire, sourd d'abord puis sonore. La deuxième ligne représente la transcription traditionnelle, la troisième est la lettre arabe équivalente. La transcription phonétique est en API.
Bilab./ Labio-dent. |
Interdental | Alvéolaire | Palat. | Vél. | Uvul. | Pharyng. | Glot. | |||
---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|
Ordinaire | emphatique | |||||||||
Nasales | m م | n ن | ||||||||
Occlusives | Sourde (non voisée) | (p) پ | t ت | tˤ ط | k ك | q ق | ʔ ء | |||
Sonore (voisée) | b ب | d د | dˤ ض | dʒ ج | (g) | |||||
Fricatives | Sourde (non voisée) | f ف | θ ث | s س | sˤ ص | ʃ ش | x ~ χ خ | ħ ح | h ه | |
Sonore (voisée) | (v) ڤ | ð ذ | z ز | ðˤ ظ | ɣ ~ ʁ غ | ʕ ع | ||||
Spirantes | w و | l ل | (lˤ ل) | j ي | ||||||
Vibrantes | r ر |
Notez que [w] est en fait une spirante labio-vélaire ; /t/ et /d/ sont des apico-dentales, comme en français.
Les lettres « R » correspondent à des sons existants en français, la difficulté étant de les distinguer alors que le français ne le fait pas.
Les R arabes | sourde | sonore |
---|---|---|
Pharingal (en arrière) | ح /ħ/ | ع /ʕ/ |
Vélaire (habituel) | خ /x/ | غ /ʁ/ |
Alvéolaire (roulé) | — | ر /r/ |
Les deux lettres (ع=3) et (ح=H) sont toutes deux des fricatives pharyngales articulées de la même manière, (ع=3) étant voisée et (ح=H) sourde. Ces deux sons n'existent pas en français. Ils s'apparentent au (غ=R) « grasseillé », mais articulé beaucoup plus en arrière, comme si on était étranglé.
La hamza est une attaque vocalique qui existe en français, c'est ce qui fait la différence entre « Léa » (sans attaque) et « les "A" » (avec réattaque). Bien que ne faisant officiellement pas partie de l'alphabet arabe, la hamza peut se rencontrer dans toutes les positions où l'on trouve une consonne : entre deux voyelles différentes ou identiques, mais également en début ou en fin de syllabe.
L'arabe connaît une série de consonnes complexes, dites « emphatiques », qui comprennent, simultanément au phonème, un recul de la racine de la langue (créant ainsi une augmentation du volume de la cavité buccale) vers le fond de la bouche (recul noté en API au moyen de « ̙ » souscrit) et une pharyngalisation (API : « ˤ » adscrit), c'est-à-dire une prononciation simultanée du phonème au niveau du pharynx, là où s'articule ḥ [ħ]. On note aussi une certaine vélarisation, ou prononciation simultanée du phonème au niveau du palais mou, le velum ou « voile du palais ».
Ainsi, une emphatique est un phonème complexe, marqué par plusieurs caractéristiques qui se superposent les unes aux autres :
Les consonnes emphatiques sont les suivantes :
[t̙ˤ] | [ð̙ˤ] | [s̙ˤ] | [d̙ˤ] |
ṭ | ẓ | ṣ | ḍ |
ﻁ | ﻅ | ﺹ | ﺽ |
Le /l/ emphatique ne se rencontre que dans le nom Allah. De nombreux ouvrages notent, par exemple pour ṭ, [t̴], en ne gardant que le symbole pour la vélarisation.
Les consonnes des syllabes d'un même mot précédant ou suivant une consonne emphatique ont tendance à être plus ou moins emphatiques elles aussi, par assimilation et dilation.
D’autre part, les consonnes dites « emphatiques » se distinguent en partie par leur prononciation propre, mais également par l’effet qu’elles ont sur la prononciation des voyelles associées : le fatha sonne comme un « a », et non pas comme un « è », le kesra comme un « é », et non pas comme un « i », et le dhamma comme un « o », et non pas comme un « ou » ; ex.: طَبَّ - thabba, طِبْ - théb, طِرْ - thér, طُرًّا thorran.
Dans le cas de l'arabe, l'influence des emphatiques sur les autres consonnes (et sur les voyelles) est autant régressive (ou « anticipatoire », les syllabes précédant l'emphatique étant touchées) que progressive (ou « persévérative », les syllabes suivant l'emphatique étant concernées). Un y [j] bloque le processus.
Ainsi, une chaîne de phonèmes imaginaire kataṣafan /katas̙ˤafan/ sera réalisée [k̙ˤat̙ˤs̙af̙ˤan̙ˤ] (considérant tout de même que les phonèmes touchés par l'influence de l'emphatique ne sont pas aussi emphatiques que le phonème responsable de l'effet ; ainsi le /k/ au début de l'exemple n'est pas aussi profond que [q], véritable emphatique de /k/), mais une chaîne kaytaṣayfan /kajtas̙ˤajfan/ vaudra en théorie [kajt̙ˤas̙ˤajfan] : seul le /t/ sera touché, les autres consonnes étant « protégées » par le [j].
La présence d'emphatique, comme on le verra plus loin, a aussi une influence sur le timbre des voyelles.
Le système vocalique de l'arabe est fort simple. Il n'a, pour ainsi dire, que trois timbres et quelques diphtongues composées des timbres fondamentaux. Dans l’écriture, ils se placent comme diacritique au-dessus ou au-dessous d'une lettre, matérialisée ici par le trait horizontal. On exprime les sons des voyelles par les trois signes ‹ ــَـ ›, ‹ ــُـ › et ‹ ــِـ ›. Ces signes ne se lisent et ne se prononcent qu'après la lettre consonne avec laquelle ils forment un son articulé.
Le « a » est en réalité une voyelle neutre, de repos, qui peut être altérée par deux types de mise en tension, horizontale pour « i » et verticale pour « o »[Quoi ?]. Les arabophones, en parlant, ne font pas toujours entendre la voyelle régulière, mais un certain son qui n'est ni celui de l' « a », ni celui de l' « e », ni celui de l'o, et qui est une sorte d'intermédiaire entre le son de l' « e » et celui de l' « a »[17]. Par rapport à ces voyelles, les deux consonnes [j] (ي) et [w] (و) jouent un rôle particulier, parce qu’elles sont l’aboutissement sous forme de consonne de cette mise en tension d’une voyelle : de ce point de vue, [j] (ي) et [w] (و) ne sont que les variantes devant ou après voyelle de [i] (ــِـ) et [u] (ــُـ) respectivement. De ce fait, il n’y a pas de différence sensible entre une syllabe fermée par une voyelle faible et une diphtongue :
Contrairement à la prolongation simple, la diphtongue se marque par un djezma (ــْـ) sur la lettre de prolongation.
En dialectal, les timbres sont profondément altérés. Dans la pratique, il existe un plus grand nombre d'allophones, surtout dans le contexte emphatique.
[j] et [w] ne sont que les variantes devant ou après voyelle de [i] et [u] respectivement. De fait, les diphtongues [ij] et [uw] sont réalisées [iː] et [uː] (notées ‹ ī ›, ‹ ū › ou ‹ î › et ‹ û › respectivement) :
Les voyelles changent légèrement de timbre selon le contexte dans lequel elles se trouvent. Deux d'entre eux en particulier sont remarquables : lorsque la voyelle est précédée ou suivie dans le même mot d'une emphatique et en fin de mot.
1. L'influence des emphatiques s'applique aussi aux voyelles. Un ḥāʾ [ħ] possède le même effet qu'une emphatique :
Dans des prononciations encore plus relâchées, [i], [iː], [u] et [uː] peuvent être prononcés [ɤ].
2. En fin de mot, [a] > [ɐ] .Les voyelles longues subissent aussi souvent un abrègement en fin de mot.
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