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Fano
Image illustrative de l’article Fano (milice)
Drapeau de l'Ethiopie sans "l'étoile à cinq branches", souvent utilisé par les nationalistes éthiopiens

Création 2010
Activité Années 2010 - Présent
Pays Ethiopie
Origine Amhara
Type Milice
Rôle Guerilla
Guerres Guerre du Tigré

Révolte Oromo

Insurrection en région Amhara

Commandant historique Gobe Melke

Fano (en amharique : ፋኖ [fanːo]), aussi appelée FANO ou Fanno, est une milice nationaliste[1] et irrédentiste[2] Amhara créée dans les années 2010. Cette dernière revendique notamment l'annexion de plusieurs territoires à la région Amhara, notamment la zone de Metekel actuellement située dans le Benishangul-Gumuz, la zone de Mi'irabawi dans le Tigré, ou encore de la woreda de Dera en Oromia[3]. La milice a connu une importante montée en puissance pendant la guerre du Tigré durant laquelle, voyant l'opportunité d'annexer la zone de Mi'irabawi à la région Amhara, elle a soutenu militairement les forces fédérales éthiopiennes dans leur guerre contre les rebelles du Front de libération du peuple du Tigré (FLPT)[4].

Histoire

La milice Fano est créée dans les années 2010. Elle puise son origine dans la contestation de la population Amhara à l'encontre du gouvernement central dominé par les tigréens du FLPT (alors majoritaire au sein du Front démocratique révolutionnaire du peuple éthiopien) qui a dominé la politique éthiopienne de 1991 à 2018 grâce à un système à parti unique[5]. À partir de 2015, le système instauré par le FLPT au lendemain des guerres civiles éthiopiennes[6] prend fin sous la pression des différentes ethnies éthiopiennes qui vivent de plus en plus mal la domination tigréenne sur la vie politique du pays[7]. La population Amhara et la milice Fano participent massivement à ce mouvement de contestation[8] qui aboutit finalement à la fin de la domination tigréenne et à l'arrivée en 2018 de Abiy Ahmed[9] (Oromo par son père et Amhara par sa mère)[10] au pouvoir[11].

Perception

Fano est perçu par différents médias et groupes de défense des droits humains comme un groupe de protestation ou une milice[1]. En octobre 2020, l' Organisation pour la Paix Mondiale a décrit Fano comme un «groupe de jeunes justiciers amhara» qui se considère comme garant de la loi et l'ordre en substitution au gouvernement jugé incapable de les garantir. La milice Fano a acquis une popularité considérable auprès des Amharas, notamment avec sa mobilisation contre l'invasion du FLPT de la région Amhara en 2021, ainsi que, de manière plus générale, par ses efforts pour protéger les intérêts des Amharas en Éthiopie[12]. Cependant la violence que cette milice emploi pour parvenir à ses fins lui vaut d'être qualifiée par ses détracteurs de « neftenya ». (pp17, 52)

Structure et commandement

Au 23 avril 2020, le chef de Fano était Mesafint Tesfa, selon l'agence de presse Borkena[13]. Cependant la structure de commandement de Fano reste très mal connue. Al-Jazeera décrit Fano comme une "milice à temps partiel, recrutant des volontaires parmi la population locale [amhara]".[14]

Activités paramilitaires et accusations de massacres

La milice Fano est connue pour ses nombreux actes violents commis notamment dans le but de défendre les populations Amharas, parfois persécutées en dehors de la région Amhara[15]. En janvier 2019, d'après Amnesty International, la milice à notamment été impliqué dans des affrontements contre des civils Kimants à Metemma dans la région Amhara. Au cours ces combats, 58 personnes auraient perdus la vie. Les violences ne sont arrêtées qu'avec l'intervention des Forces de défense nationale éthiopiennes[16].

Le , à Gondar et Dabat, des affrontements ont eu lieu entre les forces de sécurité régionales et fédérales et des jeunes amharas appartenant à la milice Fano d'après Andafta Media[17].

Le 28 mars 2020, le président de Fano à l'époque, Solomon Atanaw, déclare à propos de ces affrontements, que ce sont les forces de sécurité régionales et fédérales qui ont attaqué les miliciens de Fano. Ce dernier à ajouté que les membres du groupe étaient menacés de mort par les autorités. La ville de Gondar a de son côté déclaré que durant les affrontements des membres de Fano avaient tué et kidnappé des personnes, libéré des prisonniers et volé des armes dans des postes de police. Elle a donc appelé le groupe à se désarmer et à se rendre immédiatement. Atanaw a déclaré que Fano ne se désarmerait pas tant que ses demandes concernant la cession à la région Amhara des territoires revendiqués par le groupe n'auraient pas été satisfaites par le gouvernement fédéral. Ce dernier à même affirmé que Fano avait contribué à la paix en empêchant une attaque antigouvernementale par des extrémistes de l'ethnie Kimant[18].

Finalement le 23 avril 2020, un accord entre Fano et le gouvernement éthiopien est conclu. Le groupe s'engage donc à cesser ses activités militaires[13].

Implication dans la guerre du Tigré

À partir d'octobre 2021, dans le cadre de la Guerre du Tigré, les Fano soutiennent militairement l'armée éthiopienne, qui après avoir subi une série de très lourdes défaites en territoire tigréen[19] est dans l'incapacité d'empêcher l'offensive du FLPT en territoire Amhara[20].

Des combattants Fano à Lalibela après avoir repris la ville aux troupes tigréennes.

Durant la guerre du Tigré, des témoignages relatent des violences ethniques commis par les Fano avec parfois le soutien de l'armée éthiopienne[21]. Un réfugié tigréen interrogé par The Guardian, a notamment déclaré avoir été battu par les forces de sécurité fédérales "jusqu'à ce qu'il soit couvert de sang et ne puisse plus marcher". Il aurait finalement été transféré à un groupe Fano, qui l'a autorisé à partir. Ce même réfugié dit que les Fano ont reçu pour ordres de détruire le village d'Huméra, situé au Nord-Ouest du Tigré et de « finir les Tigréens ». De manière générale, les violences ethniques commises par les Fano, l'armée éthiopienne ou par d'autres milices semblent avoir été courantes au Tigré[22].

Affrontements avec l'armée éthiopienne

Montée des tensions

Le 19 mai 2022, des affrontements ont éclaté entre l'armée éthiopienne et les Fano dans la ville de Mota. La cause de ces combats seraient une tentative de désarmement et d'arrestation de membres locaux de la milice par les forces gouvernementales[4],[12]. Une manifestation dans le ville en protestation à ces arrestations aurait également eu lieu le même jours. Les forces gouvernementales auraient tiré dans la foule entrainant un nombre inconnu de victimes[12]. Le 23 mai 2022, les médias d'État locaux ont rapporté que plus de 4000 personnes avaient été arrêtées dans la région d'Amhara[23]. Les autorités régionales Amhara alignées sur le Parti de la prospérité ont déclaré qu'elles ne ciblaient pas Fano mais des individus qui avaient commis des actes illégaux au nom de Fano[12],[24].

Révolte ouverte contre le gouvernement fédéral

Le , des combats entre les Fano et l'armée éthiopienne éclatent dans toute la région Amhara, notamment dans les villes de Debre Tabor, Kobo et Gondar qui comptent parmi les villes les plus peuplées de la région[25]. À la télévision d'État EBC, le colonel Getnete, porte-parole des Forces de Défense Nationale Ethiopiennes, a averti que l'armée prendrait des mesures si Fano continuait de « perturber la paix du pays »[26]. Le 4 aout, en réponse à l'escalade des problèmes sécuritaires dans la région Amhara, le gouvernement éthiopien a déclaré l'état d'urgence[27]. Cela lui permet d'interdire les rassemblements publics, procéder à des arrestations sans mandat et mettre en place un couvre-feu[28].

Références

  1. a et b (en) « Preaching unity but flying solo, Abiy’s ambition may stall Ethiopia’s transition »
  2. « Reportage en Éthiopie au bord de l'abîme »
  3. « Fano Will Not Lay Down Arms If Demands Are Not Met: Chairman »
  4. a et b « Journalists, general, militiamen arrested in Ethiopia's Amhara », Reuters,‎
  5. (en) Jason Burke, « Rise and fall of Ethiopia’s TPLF – from rebels to rulers and back », The Guardian,‎ (lire en ligne, consulté le ).
  6. (en) Tom Gardner, « 'Freedom!': the mysterious movement that brought Ethiopia to a standstill », The Guardian, (consulté le )
  7. « Plus de 1.100 personnes arrêtées depuis l'état d'urgence en Éthiopie »
  8. « Éthiopie : comprendre la contestation qui secoue le pays »
  9. « Le nouveau Premier ministre prône la concorde en Éthiopie »
  10. (en) « The rise of Abiy “Abiyot” Ahmed »
  11. (en) Edalina Rodrigues Sanches, Popular Protest, Political Opportunities, and Change in Africa, Taylor & Francis, , 14, 181–193 (ISBN 9781000569100, lire en ligne)
  12. a b c et d (en) « Ethiopia Peace Observatory Weekly: 14-20 May 2022 [EN/AM] - Ethiopia | ReliefWeb », reliefweb.int (consulté le )
  13. a et b (en-US) « Fano leader reportedly gave in through mediation », Borkena Ethiopian News, (consulté le )
  14. « Ethiopia accuses Amhara militia of seeking to overthrow government »
  15. « Éthiopie. Les autorités doivent enquêter sur le massacre d’Amharas perpétré à Tole »
  16. (an) « Ethiopia: “Beyond Law Enforcement” Human Rights Violations by Ethiopian Security Forces in Amhara and Oromia [Amharic] »
  17. (an) « Gondar region security incident left at least three injured »
  18. (an) « Fano Will Not Lay Down Arms If Demands Are Not Met: Chairman »
  19. « La guerre du Tigré, un désastre militaire pour l’Éthiopie »
  20. « En Éthiopie, la « petite » guerre totale »
  21. (an) « 'He's Planning to Exterminate Us All': Ethiopians Speak of Ethnic Massacres »
  22. (an) « 'I saw people dying on the road': Tigray's traumatised war refugees »
  23. (an) « More than 4,000 arrested in Amhara as Ethiopia cracks down on militia »
  24. (en) « Ethiopia arrests 4,000 in Amhara region crackdown, local state media report », Reuters,‎
  25. « En Ethiopie, la région Amhara théâtre d’affrontements entre des milices et l’armée nationale »
  26. (en) « Flights cancelled after clashes in Ethiopia's Amhara region », The East African, (consulté le )
  27. « En Éthiopie, le gouvernement décrète l’état d’urgence après des affrontements armés en région Amhara »
  28. (en) « Multiple injuries as Ethiopian military, militia clash in Amhara: Sources », www.aljazeera.com (consulté le )

Voir aussi