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Pour la période la plus ancienne, l'Éémien, une période interglaciaire particulièrement tempérée, les températures ont même été très élevées sur une quinzaine de millénaires[2]. Elle fait l'objet de fouillesarchéologiques.
En dépit de son nom, il n'est pas prouvé qu'elle a été fréquentée par la bande du célèbre contrebandier du XVIIIe siècle, Louis Mandrin, bien que ce dernier ait séjourné dans les environs.
Situation et description
Cet abri sous roche est situé à environ 2,5 km au sud-est du centre-ville de Malataverne (une dizaine de kilomètres au sud de Montélimar, Drôme), sur la rive gauche du Rhône à l'est de l'autoroute A7, à une altitude de 226 mètres[a], sur le flanc nord-ouest d'un rocher calcaire appelé « Roucoule » qui culmine à 392 mètres[3]. Roucoule est aussi le nom du lieu-dit de Malataverne sur lequel se situe le rocher, aux limites des communes d'Allan et Roussas.
L'ouverture d'environ 12 m de large est orientée au nord. Le plafond de la grotte atteint une hauteur de 2,5 m dans la zone d'entrée puis se réduit à 1 m vers le fond de la cavité. La surface est d'environ 25 mètres carrés[3]. En 2013, la zone située en face de l'abri est couverte et clôturée. Depuis 2016, le site est surveillé.
Historique
Le nom de la grotte lui a été donné par son inventeur au début des années 1960, Gaston Étienne[4],[3], qui pensait qu'elle avait pu être occupée par Louis Mandrin, le célèbre contrebandier du XVIIIe siècle, car il était probablement venu séjourner plusieurs fois dans les environs, à Roucoule[5].
En 2017, la grotte Mandrin a été l'objet d'une des premières études fuliginochronologiques en France[1]. L'étude a porté sur des échantillons de parois calcaires dans lesquels ont été piégées des traces de suie — échantillons prélevés dans plusieurs couches stratigraphiques de 2006 à 2017. Ces dépôts de suie proviennent des feux allumés par les habitants du Paléolithique.
L'ensemble archéologique de la grotte Mandrin, couvrant l'emprise des gisements grotte et talus, thalweg, crête sommitale et tête de vallon fait l'objet d'une inscription au titre des Monuments historiques par arrêté du [6].
Préhistoire
Occupations humaines
Le site a été habité par des groupes d'hommes de Néandertal et d’Homo sapiens. L'intérêt que les archéologues portent à cette grotte tient notamment au fait que les installations de ces deux populations n'y sont séparées que de quelques années, ou peut-être d'un intervalle plus court ; il est même possible d'envisager que la grotte Mandrin ait été un lieu de rencontre des Néandertaliens et des Hommes modernes[1].
Une étude publiée en 2022 conclut à l'occupation par Homo sapiens datée à −54 000 ans (entre 56 800 et 51 700 ans, calibrés, avant le présent)[7],[8]. La datation, obtenue par fuliginochronologie et confirmée par thermoluminescence, concerne une couche de sédiments nommée E. Cette couche contient des outils modernes (fins et standardisés) et une molaire cassée d'un bébé, dont le talonide est moderne (carré), alors que les couches immédiatement en dessous et au-dessus contiennent des restes néandertaliens et des outils moustériens[9],[8].
Assemblages archéologiques
Des similitudes rapprochent des assemblages archéologiques de la grotte Mandrin (couche E) et ceux trouvés dans un site levantin, Ksar Akil au Liban (couches XXV à XXI). Les chercheurs supposent une origine externe à l'Europe des industries de la grotte rhodanienne, en accord avec l'hypothèse d'une dispersion de l'Homme moderne du Proche-Orient vers l'Europe dans la période initiale du Paléolithique supérieur[10],[11],[12]. Ludovic Slimak estime possible qu'« une communauté sapiens probablement venue du Levant » ait fait une « incursion dans la vallée du Rhône »[13]. Le paléoanthropologueJean-Jacques Hublin estime que cette hypothèse reste à confirmer[13].
Génétique
Des restes fossiles d'un néandertalien surnommé Thorin ont été découverts en 2015 à l'entrée de la grotte à proximité de restes archéologiques typiques de la technologie finale datée dans la région à 50 000–40 000 ans, et sont progressivement dégagés. Un fragment du palais et plusieurs dents ont été étudiés en 2024, morphologiquement et génétiquement. Le génome indique que cette population néandertalienne à divergé il y a environ 105 000 ans des autres néandertaliens tardifs et qu'elle n'a reçu aucune introgression des autres populations de cette époque connues en Europe. Elle est donc restée isolée génétiquement pendant environ 50 000 ans, malgré la relative proximité géographique de ces autres populations européennes[14],[15].
↑D'après la courbe de niveau « 225 m » de la carte IGN sur laquelle est précisément localisée la grotte. Un pointage à l'aide de la carte IGN interactive (geoportail.gouv.fr) donne 226 m à 0,5 m près.
↑Vincent Charpentier avec Ludovic Slimak, « Chasseur de néandertaliens », sur France Culture, Carbone 14 à 19:30/29:33, (consulté le ). On peut supposer que, dans cet interview, l'auteur parle en degrés Celsius. Ainsi l'écart est alors de 2 °C supérieurs à la température actuelle des océans, ce qui amène, sur terre à des températures bien plus élevées « plus de 10 °C, ici, localement ».
↑Marine Benoit, « Une dent de lait bouleverse ce que l'on pensait savoir de Sapiens et de son apparition en Europe », Sciences et Avenir, (lire en ligne).
↑ a et b(en) Ludovic Slimak, Clément Zanolli, Tom Higham, Marine Frouin, Jean-Luc Schwenninger et al., « Modern human incursion into Neanderthal territories 54,000 years ago at Mandrin, France », Science Advances, vol. 8, no 6, (DOI10.1126/sciadv.abj9496, lire en ligne, consulté le ).
↑Ludovic Slimak, « Mosaïques culturelles des derniers Néandertaliens et des premiers Hommes modernes. Les données de la vallée du Rhône », dans Jean-Jacques Cleyet-Merle et al., Le Troisième Homme, Paris, RMN, (ISBN978-2-7118-6431-7, lire en ligne), p. 154.
↑Damien Flas, La transition du Paléolithique moyen au supérieur dans la plaine septentrionale de l’Europe, Société royale belge d'Anthropologie et de Préhistoire, 2008, p. 127-128.
↑(en) Ludovic Slimak, Tharsika Vimala, Andaine Seguin-Orlando, Olivier Dutour, Thomas Higham et al., « Long genetic and social isolation in Neanderthals before their extinction », Cell Genomics, vol. 4, no 9, , article no 100593 (lire en ligne, consulté le ).
Pierre Barthélémy, « Dans la Drôme, une découverte bouleverse l’histoire du peuplement de l’Europe par « Homo sapiens » », Le Monde, (lire en ligne, consulté le ).
Laure Metz et Ludovic Slimak, « La Grotte Mandrin, derniers Néandertaliens et premiers Hommes modernes en vallée du Rhône », Archéologia, no 555, , p. 20-29 (ISSN0570-6270).
Ludovic Slimak, « Le Néronien et la structure historique du basculement du Paléolithique moyen au Paléolithique supérieur en France méditerranéenne », Comptes Rendus Palevol(nl), vol. 6, no 4, , p. 301-309 (lire en ligne, consulté le ).
Filmographie
Rob Hope, Crépuscule néandertalien, pour aube moderne, 2015, 52 minutes, Y. N. Productions, Ville de Malataverne, Montagne TV, avec Ludovic Slimak, Tom Higham(en), Eske Willerslev(en), Laure Metz, et Ségolène Vandevelde. Prix du jury et du public du festival de films d'archéologie à Narbonne en ; sudoc [1] ; fiche sur Film documentaire.fr et présentation vidéo (3:27) [2].