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« Trumna dla rybaków », un « cercueil pour les pêcheurs », un signe visible sur les flancs de certains bateaux de pêche polonais pour protester contre l'interdiction de pêcher la morue.
Affiche contre l'Union européenne à Athènes en 2005.
Une protestation multilingue à la Constitution européenne.
Un exemple d'action eurosceptique, un drapeau de l'UE vandalisé à Sopot en Pologne.

L’euroscepticisme est une attitude critique à l'égard de l'intégration européenne et à l'Union européenne[1],[2] basée notamment sur un doute quant à sa viabilité ou son utilité[3],[4],[5]. De manière encore plus prononcée que les pro-européens, les eurosceptiques ne constituent pas un bloc homogène mais comprennent les « mouvements d’opposition à la construction européenne »[6]. Selon Agnès Alexandre-Collier ce terme est ambigu, allant « de la simple suspicion à l’opposition militante en passant par l’hostilité passive, soulignant que l’euroscepticisme revêt autant de formes qu’il existe de motifs de désapprobation »[7].

On peut parler également d’europhobie ou d’anti-européanisme pour désigner une opposition franche à l'Union européenne ou à l'intégration européenne, parfois marquée par la volonté de remettre celle-ci en cause[N 1], par exemple dans le cadre de projets tels que le Brexit au Royaume-Uni ou le Frexit en France.

Les eurosceptiques s'opposent aux « pro-européens » (partisans du modèle actuel, voire d'une intégration européenne plus accrue, par exemple, le fédéralisme européen) et se différencient des eurocritiques (partisans d'une construction européenne mais sur un autre modèle, par exemple, une Europe des nations dépourvue de transferts importants de la souveraineté nationale).

Définition de la notion

Début du XXe siècle : la notion d'« anti-européen »

Au début du XXe siècle, le terme le plus utilisé pour désigner les courants s'opposant à l’unification européenne était celui d'« anti-européen ». Le terme est ainsi utilisé par Richard Coudenhove-Kalergi dans son ouvrage Paneurope, qu'il oppose à celui de « paneuropéen »[6] ; et par Nikolaï Danilevski dans son ouvrage La Russie et l'Europe[8][source insuffisante].

L'expression fut aussi reprise par le mouvement fasciste italien qui a créé, sous la direction d'Asvero Gravelli, la revue Anti-Europa[8][source insuffisante]. Le terme dénote l'idée, en Italie fasciste, de rejet des valeurs humanistes, de la démocratie libérale et de la bourgeoisie[6].

Apparition de la notion d'euroscepticisme : distinction hard euroscepticism et soft euroscepticism

Le terme « euroscepticisme » semble issu du néologisme « euroscepticism » apparu dans la presse britannique[N 2]. Il désigne alors ceux opposés à la construction européenne au sein du Parti conservateur[6].

L'universitaire Agnès Louis souligne qu'un ensemble d’auteurs, tels que Bernard Bruneteau, « récusent le concept d’euroscepticisme, dans la mesure où celui-ci écraserait la variété, culturelle et idéologique, des « résistances » à l’Union »[9]. Une typologie de l'euroscepticisme a été proposée par Aleks Szczerbiak et Paul A. Taggart afin d'identifier les courants le formant. Ils ont ainsi distingué le hard euroscepticism et le soft euroscepticism[10].

Pour eux, la notion de hard euroscepticism est définie comme « un principe d'opposition à l'Union européenne et à l'intégration européenne et qui est, par conséquent, visible dans les partis qui considèrent que leurs pays devraient se retirer de l'Union, ou dont les politiques envers l'UE équivalent à être opposé à l'ensemble du projet d'intégration européenne telle que conçu actuellement »[N 3]. La notion peut se traduire par l'expression « euroscepticisme dur » et inclure des éléments tels que l'« europhobie »[6] ou la « xénophobie »[11].

La notion de soft euroscepticism est, quant à elle, définie comme « un principe qui ne s'oppose pas à l'intégration européenne ou à l'adhésion à l'Union européenne mais dans lequel les doutes liés à certaines politiques conduisent à l'expression d'une opposition nuancée à l'Union, ou dans lequel l'« intérêt national » est ressenti comme étant pour le moment en désaccord avec la trajectoire de l'Union »[N 4]. Cette dernière notion se traduit par l'expression d'« euroscepticisme modéré »[6], et peut inclure des éléments tels que la « non‑intégration », l'« euroréalisme », le « populisme », l'« ennui européen » ou la critique de l'UE[11].

L'emploi de hard euroscepticism est critiqué en ce que les politologues ont constaté, en France, lors des débats sur le traité de Maastricht, que l'opposition au traité ne se matérialisait pas systématiquement par de l'« anti-européisme », mais parfois par la volonté d'une autre Europe. Ainsi, les gaullistes étaient « pour » l'Europe de l'Atlantique à l'Oural, l'extrême droite « pour » une Europe des nations et des patries, et ces courants manifestaient donc un soft euroscepticism[6],[N 5]. La notion d'euroscepticisme peut être rapprochée de celle de souverainisme, apparue dans les années 1996-1997 en France. Celle-ci fut utilisée par des associations en lutte contre les traités de Maastricht et d’Amsterdam pour ne pas être qualifiées d'« anti-européennes »[6].

Autre tentative de définition de l'euroscepticisme : un idéal-type

Petr Kopecky et Cas Mudde ont proposé, en 2002, une autre classification de l'euroscepticisme. Cette classification prend la forme d'un tableau aux paramètres suivant : europhile, europhobe d'une part ; et EU-optimist et EU-pessimist d'autre part[12]. Ces deux derniers paramètres se définissent ainsi :

  • la position de EU-optimist est définie comme étant la position de ceux soutenant l'UE telle qu'elle a été mise en œuvre et qu'elle est dirigée. Selon leur définition, une attitude critique envers une certaine politique de l'Union européenne ne disqualifie pas le parti de sa position de EU-optimist. Dès lors que le parti accepte l'actuelle structure de l'UE dans son ensemble, il est dans cette catégorie[N 6],[13].
  • la position de EU-pessimist au contraire est la position de ceux qui ne soutiennent pas la forme actuelle de l'UE ou sont pessimistes sur ses développements. Cela ne veut pas dire, pour autant, qu'un EU-pessimist s'oppose à l'adhésion. Il peut s'agir simplement d'une opposition au développement de l'UE, contraire à leur propre interprétation de l'idée d'intégration européenne[13].

En combinant ces quatre paramètres, quatre idéaux-types apparaissent :

  • les euroenthusiasts : les partis ou groupes qui combinent les europhiles et EU-optimists. Ils soutiennent l'idée générale d'intégration européenne et croit que l'UE en est l'incarnation[13].
  • les eurosceptics : les partis ou groupes combinant les europhiles et EU-pessimists. Ils soutiennent l'idée générale d'intégration européenne mais sont pessimistes sur les développements de l'UE par rapport à leur opinion de l'intégration[13].
  • les europragmatists : ils regroupent les europhobes et les EU-optimists. Ils ne soutiennent pas l'idée d'intégration européenne à la base de l'UE (sans nécessairement s'y opposer), mais soutiennent l'UE[13].
  • les eurorejects : ils sont à la fois europhobes et EU-pessimists, ne soutiennent ni l'UE ni l'intégration européenne[13].

Petr Kopecky et Cas Mudde soulignent cependant qu'il s'agit d'idéaux-types et que la notion d'« euroscepticisme » en soi est floue en ce qu'elle correspond à différentes visions de l'UE et de l'intégration européenne. Ils soutiennent cependant que l'europhilie sous-tend l'euroscepticisme[14].

Cependant, Ümit Yazmaci souligne que le concept d'euroscepticisme, dans son acception commune, n'est pas aussi restrictif que celui proposé par Petr Kopecky et Cas Mudde. Il considère, ainsi, que le « concept même d’euroscepticisme est promptement contesté en tant qu’instrument conceptuel pour ne pas avoir entièrement expliqué tous les aspects et les formes polymorphes des oppositions à l’intégration européenne »[15].

Neutralités des termes employés

Pour Ingrid Riocreux, universitaire spécialiste de rhétorique et stylistique, l'usage du terme « europhobe », au rebours de ce que pense la plupart des journalistes, n'est pas du registre de l'information, mais de celui du jugement. En effet, la connotation péjorative du suffixe « -phobe » suscite une forme de répulsion. Elle montre que les mots en « -phobe » sont davantage des mots de lobbies ou de militants visant à discréditer de manière commode les opposants à une cause qu'ils défendent que des mots neutres et impartiaux[16].

Positionnement

Les arguments mis en avant par les eurosceptiques reposent sur plusieurs aspects : politique, économique ou encore culturel.

En matière politique, les eurosceptiques considèrent que l'intégration européenne se fait sans la volonté des peuples (et font, à ce titre, référence au traité de Lisbonne)[17]. À cela, s'ajoute l'abstention aux élections européennes. Par ailleurs, les eurosceptiques considèrent qu'il y a un abandon de la souveraineté nationale dans l'intégration européenne[17].

En matière économique, les eurosceptiques critiquent notamment la création de l'euro, les politiques économiques menées par la BCE ou le caractère libéral de l'Union.

Sur le plan culturel, l'harmonisation menée au niveau du processus législatif (notamment dans le cadre de l'adoption de règlements) est critiquée par les eurosceptiques car ils considèrent que cela gomme les différences nationales[17].

Certains mouvements et responsables eurosceptiques de droite (Rassemblement national, Mouvement pour la France, Nicolas Dupont-Aignan en France, Ligue du Nord en Italie, Jobbik en Hongrie, Alliance civique démocratique en République tchèque, Parti de la Grande Roumanie, Ligue des familles polonaises) reconvertissent les arguments antisoviétiques pour critiquer l'Union européenne, comparée à l'URSS « pour son autoritarisme et le poids de sa bureaucratie »[18].

Euroscepticisme en Union européenne

Au niveau européen

Opinion publique européenne

De 1983 à 2011, l'Eurobaromètre a sondé l'opinion publique afin de déterminer si celle-ci considérait que l'appartenance à l'UE avait été un plus pour leur État membre. En avril 1990[N 7], en mars 1991[N 8] et en mai 2007[N 9], 59 % des sondés considéraient que leur État avait bénéficié de l'adhésion. À l'inverse, le pourcentage de personnes considérant que leur État n'avait pas bénéficié de l'adhésion est monté jusqu'à 39 % en 2010[N 10],[19].

L'Eurobaromètre indique que, à la question de savoir si les citoyens européens éprouveraient de « grands regrets », un « vif soulagement », ou de l'« indifférence » en cas d'abandon de l'Union européenne, environ 80 % d'entre eux hésitent entre le « grand regret » et l'« indifférence »[20].

Tableau des partis politiques européens eurosceptiques

Tableau
Partis politiques eurosceptiques actuels au Parlement européen
Nom Sigle Idéologie Reconnaissance par l'UE
Alliance des conservateurs et réformistes européens AECR Conservatisme
Euroscepticisme
Reconnu
EUDemocrats - Alliance pour une Europe des démocraties EUD Souverainisme
Euroscepticisme
Reconnu
Libertas Souverainisme
Euroscepticisme
Non reconnu
Mouvement pour l'Europe des libertés et de la démocratie MELD Conservatisme
Souverainisme
Euroscepticisme
Reconnu
Europe des Nations et des Libertés MENL Nationalisme
Souverainisme
Patriotisme
Euroscepticisme
Reconnu
Alliance européenne des mouvements nationaux AEMN Ultranationalisme
Souverainisme
Euroscepticisme
Reconnu[21]
Association de partis
Anciens partis politiques eurosceptiques au Parlement européen
Nom Sigle Idéologie Période
Alliance pour l'Europe des nations AEN Nationalisme
Euroscepticisme
2002-2009
Alliance des démocrates indépendants en Europe ADIE Souverainisme
Euroscepticisme
2005-2008
Démocrates européens DE Libéral-conservatisme
Euroscepticisme
1979-1992 (groupe indépendant)
1992-2009 (parti informel associé au PPE)
Mouvement pour la réforme européenne MER Libéral-conservatisme
Euroscepticisme
2006-2009

La France est le seul État de l’Union européenne à avoir toujours été représenté au sein des partis politiques européens eurosceptiques[22].

Au niveau des États membres

Opinions publiques

À la question de savoir si l’appartenance à l'Union européenne est un gaspillage d'argent, 50 % des Autrichiens pensent que c'est le cas (- 4 points par rapport à l’automne 2012), 40 % des Suédois partagent cet avis (- 4 points par rapport à l’automne 2012) ainsi que 38 % des Tchèques (+ 2 points par rapport à l’automne 2012)[23].

L'opinion des européens quant à la direction prise par l'UE varie en fonction des États membres. Dans 21 États, les citoyens européens considèrent que la situation prise par l'UE est négative (contre 20 pour la situation prise par un État en particulier). Parmi ces États, les plus fortes opinions négatives enregistrées le sont en Grèce (71 %), à Chypre (62 %) et au Luxembourg (61 %). À l'inverse, les opinions négatives sur la direction prise par l’UE sont les plus faibles en Bulgarie (13 %) en Lituanie (20 %) et à Malte (22 %)[24]. Sans être positive, les plus fortes progressions des opinions négatives sur la direction prise par l'UE sont aux Pays-Bas (+ 8 points à 56 % ; tandis que les opinions positives gagnent aussi 13 points à 32 %) et en Slovénie (+ 6 points d'opinion négative à 48 % ; tandis que les opinions positives perdent 7 points à 19 %)[24].

En Croatie, le dernier État adhérent, l'opinion publique était, avant l’adhésion, majoritairement en faveur avec 38 % des sondés considérant cela comme une bonne chose, 24 % comme une mauvaise chose, et 35 % ne se prononçant pas[23].

Mouvements eurosceptiques par États membres

D'après une étude de Szczerbiak et Taggart datant de 2002 (certains partis ayant depuis changé de nom), ainsi que quelques ajouts ultérieurs, les partis eurosceptiques des États membres sont résumés dans ce tableau.

Tableau des partis par États membres
Euroscepticisme dur Euroscepticisme modéré Autres
Allemagne Les Républicains[25]
Parti national-démocrate[25]
Alternative pour l'Allemagne[26],[25]
Citoyens en colère
Autriche Parti de la liberté[25],[N 11]
Alliance pour l'avenir de l'Autriche[27]
Belgique Vlaams Belang[N 12],[25]
Front national[N 13],[25],[28]
Nieuw-Vlaamse Alliantie[29]
Parti populaire
Parti du travail de Belgique (pour une Europe sociale)[30]
Bulgarie Union nationale Attaque[N 14]
VMRO - Mouvement national bulgare
Bulgarie sans censure
Chypre Front populaire national Mouvement solidarité
Comité pour le rassemblement de la gauche radicale
Croatie Parti croate du Droit - Ante Starčević
Parti croate du Droit
Bouclier humain[31]
Danemark Mouvement populaire contre l'Union européenne[25]
Mouvement de juin[25]
Parti populaire danois[25]
Liste de l'unité[25]
Parti du progrès
Parti populaire socialiste[25]
Espagne Parti communiste des peuples d'Espagne Podemos
Vox
Candidature d'unité populaire (en Catalogne)
Estonie Parti de l'indépendance[32] Parti du centre[N 15],[33]
Parti populaire conservateur d'Estonie[34]
Finlande Parti communiste de Finlande[25] Vrais Finlandais[25],[N 16]
Chrétiens-démocrates[25]
France Les Patriotes[35]
Union populaire républicaine[36]
Debout la France[37]
Lutte ouvrière[25]
Mouvement pour la France[25]
Nouveau Parti anticapitaliste[réf. nécessaire]
Parti communiste français[25]
Parti de gauche[réf. nécessaire]
Rassemblement pour la France et l'indépendance de l'Europe[25]
Rassemblement national[25],[38],[39],[40],[41]
La France insoumise[42]
Ligue du Sud[réf. nécessaire]
Grèce Unité populaire
Alerte populaire orthodoxe
Mouvement Je ne paie pas
Grecs indépendants
ANTARSYA
Aube dorée
Parti communiste de Grèce[25]
Mouvement démocratique social[25]
Printemps Politique[25]
Synaspismós[25]
SYRIZA
Hongrie Mouvement Notre patrie Fidesz

Jobbik

La politique peut être différente[N 17]
Irlande Parti vert[N 18],[25]
Parti socialiste[43]
Sinn Féin[43]
Italie Ligue du Nord[43] Mouvement 5 étoiles

Front Populaire Italie

Frères d'Italie - Alliance nationale

Forza Italia
Lettonie Pour la patrie et la liberté
Lituanie Union du centre[33]
Luxembourg Parti réformiste d'alternative démocratique[43]
La Gauche[43]
Parti politique réformé[43]
Malte EUD Malta
Parti travailliste
Pays-Bas Gauche verte[43]
Parti socialiste[43]
Parti pour la liberté
Union chrétienne
Pologne Autodéfense de la république de Pologne[33]
Ligue des familles polonaises
Congrès de la Nouvelle droite
Droit et justice
Pologne solidaire
Portugal Parti communiste portugais[43],[44]
Bloc de gauche[45]
Les Verts[43]
République tchèque Parti communiste de Bohême et Moravie[33],[46]
Association pour la République-Parti républicain tchèque[33],[46]
Parti démocratique civique[33],[46]
Roumanie Parti social-démocrate[47]
Alliance pour l'unité des Roumains[48]
Royaume-Uni Parti pour l'indépendance du Royaume-Uni[43],[N 19] Parti conservateur[43],[N 20] Parti travailliste[N 21],[49].
Slovaquie Parti populaire « Notre Slovaquie »
Parti national slovaque[50]
Slovénie Parti national slovène[51]
Suède Parti de gauche[52]
Parti des Verts[43]
Parti du centre[43]
Parti social-démocrate[43]
Liste de juin[53]

Au Royaume-Uni, ancien Etat-membre de l'Union européenne, la force de l'euroscepticisme au sein de l'opinion publique a évidemment été illustrée par le résultat du référendum du 23 juin 2016, aboutissant au Brexit.

En France, Etat-membre fondateur, deuxième puissance démographique et économique, et première puissance militaire de l'Union européenne, l'euroscepticisme apparaît profondément ancré au sein de l'opinion publique. Ce constat est régulièrement illustré tant par les enquêtes d'opinion que par les résultats d'élections. Après s'être prononcés à une courte majorité en faveur de la ratification du Traité de Maastricht, en 1992, les électeurs français ont rejeté à une nette majorité, en 2005, le projet de constitution européenne, portant un coup d'arrêt à son adoption. Une enquête d'opinion conduite en 2019 a mis en évidence que s'ils étaient de nouveau appelés à se prononcer sur ces deux traités, les électeurs français les rejetteraient massivement[54]. Plus récemment, lors du premier tour de l'élection présidentielle d'avril 2022, 60,96% des suffrages exprimés se sont portés sur des candidats considérés comme eurosceptiques.

Euroscepticisme hors Union européenne

Dans les États candidats

Il y a six États candidats reconnus : l'Albanie, la Bosnie-Herzégovine, la Macédoine du Nord, le Monténégro, la Serbie et la Turquie. Dans le cadre des différentes procédures d'adhésion, l'Eurobaromètre sonde régulièrement les habitants de ces États candidats afin de déterminer le soutien à l'appartenance dans ces États ainsi que le bénéfice attendu de l'adhésion[55].

Opinions publiques dans les États candidats

L'adhésion à l’UE est vue positivement dans la plupart des États candidats à l’exception de l’Islande : 42 % des sondés considèrent que ce serait une mauvaise chose (- 2 points par rapport à l’automne 2012), contre 24 % d'avis positifs (- 2 points par rapport à l’automne 2012) et 29 % qui ne sait pas (+ 6 points% par rapport à l’automne 2012)[55].

La Macédoine du Nord est l’État où l'opposition à l'adhésion est la plus faible, avec seulement 16 % d'opinions négatives (+ 2 points par rapport à l'automne 2012)[N 22]. Elle est suivie de près par le Monténégro, ou il n'y a que 17 % d'opinions négatives à l'adhésion (+ 4 points par rapport à l'automne 2012)[N 23]. En Serbie et en Turquie l'opposition à l'adhésion diminue : respectivement 21 % et 31 % avec une baisse, dans les deux cas, de deux points par rapport à l'automne 2012[N 24],[N 25].

La Macédoine du Nord et le Monténégro sont les deux États candidats aux opinions négatives les plus basses avec, tous deux, 25 % d'opinions négatives[N 26],[N 27].

Positions des acteurs politiques des États candidats

Macédoine du Nord

Les acteurs politiques macédoniens sont globalement tous en faveur de l'intégration européenne et de l'adhésion à l'Union européenne. En revanche, leurs opinions s'opposent sur les réformes qui doivent être menées en premier dans le cadre du processus d’adhésion[56].

Monténégro

À l'instar des partis politiques macédoniens, les principaux partis politiques monténégrins sont en faveur de l'adhésion à l'Union européenne[57].

Serbie

Parmi les partis eurosceptiques serbes se trouvent le Parti radical, le Parti démocratique serbe[58].

Turquie

La perception de l'euroscepticisme, en Turquie, est plus négative et péjorative qu'ailleurs. En effet, le terme y est perçu comme étant proche du mot « kızılelmacı » désignant ceux qui sont favorables à la coopération entre l’extrême-droite et l’extrême-gauche ultra-nationaliste. En effet, les hommes politiques soutenant l'Europe et la modernisation ne veulent pas être qualifiés. Ils adoptent un terme offensif en qualifiant l'Union européenne de « turco-sceptique »[59].

L'euroscepticisme turc, tant dans l'opinion publique que politique, repose notamment sur l'opposition au processus de démocratisation à l'européenne, portant atteinte au kémalisme[N 28],[60]. De même, l'Union européenne est perçue comme soutenant le séparatisme kurde[61],[60]. Ce sont ces positions qui sont notamment reprises par le parti d'action nationaliste dans son programme :

« La continuation des négociations dépend des conditions de l'Union européenne, lesquelles ne doivent pas heurter l'intérêt national de la Turquie sur les sujets cruciaux tel que l'unité et l'intégrité nationale de la Turquie, la terreur et le séparatisme : Chypre, la Grèce, et l'Arménie, et le rejet de toute approche autre que la pleine adhésion à l'Union, constituent la base de notre politique. »

— Programme du parti - « relations avec l'Union »

Dans les États tiers

Euroscepticisme en Islande

En Islande, à la suite des élections parlementaires d'avril 2013, un gouvernement formé par le Parti de l'indépendance et le Parti du progrès arrive au pouvoir avec Sigmundur Davíð Gunnlaugsson (PP) comme Premier ministre. Au 22 mai 2013, la coalition décide d'arrêter les négociations d'adhésion du pays à l'Union européenne jusqu'à ce qu'un référendum soit organisé sur la poursuite du processus d'adhésion[62]. Le , le ministre des Affaires étrangères islandais Gunnar Bragi Sveinsson annonce avoir suspendu pour toute la durée de la législature les négociations d'adhésion à l'UE[63].

Outre le Parti de l'indépendance[64], les autres partis eurosceptiques sont le Mouvement des verts et de gauche[65] et le Parti libéral[66].

En matière de conséquences envisagées si l'adhésion était effective, l'Islande reste l’État au pourcentage d'opinion négative le plus élevé avec 57 % (inchangé depuis l'automne 2012)[N 29].

Euroscepticisme en Norvège

L'adhésion de la Norvège à l'UE a été rejetée à la suite de deux référendums : en 1972 et en 1994.

Le Parti du centre, le Parti populaire chrétien, le Parti socialiste de gauche, le parti Rouge et le Venstre étaient contre l'adhésion lors de ces deux référendums. Les partis du centre, rouge et socialiste de gauche sont toujours contre l'adhésion[67]. En revanche, le Venstre, le Parti du progrès et Les Verts n'ont pas pris position.

Euroscepticisme en Suisse

En Suisse, seuls les partis de gauche soutiennent l'adhésion à l'Union européenne[68]. Selon plusieurs sondages réalisés en 2011 et 2012, moins de 20 % des Suisses sont pour l'adhésion[69].

Notes et références

Notes

  1. « A principled opposition to the EU and European integration and therefore can be seen in parties who think that their countries should withdraw from membership, or whose policies toward the EU are tantamount to being opposed to the whole project of European integration as it is currently conceived. »
  2. Les dates diffèrent suivant les sources, allant du 11 novembre 1985 dans le journal The Times au 26 décembre 1992 dans The Economist (Hooghe et Marks 2007, p. 2).
  3. « A principled opposition to the EU and European integration and therefore can be seen in parties who think that their countries should withdraw from membership, or whose policies toward the EU are tantamount to being opposed to the whole project of European integration as it is currently conceived » (Szczerbiak et Taggart 2002, p. 7).
  4. « Not a principled objection to European integration or EU membership but where concerns on one (or a number) of policy areas leads to the expression of qualified opposition to the EU, or where there is a sense that ‘national interest’ is currently at odds with the EU trajectory » (Szczerbiak et Taggart 2002, p. 7).
  5. En 1997, le parti communiste français a tenté de distinguer sa position en se qualifiant d'« euroconstructif » (Le Dréau 2009).
  6. Par exemple, en dépit de certaines critiques de la politique agricole commune, le parti paysan polonais est EU-optimist non seulement parce qu'il considère l'UE comme un instrument vital de soutien des paysans, mais aussi parce qu'il soutient la forme générale et les développements des éléments politiques, institutionnels et sociaux de l'UE.
  7. En avril 1990, les résultats du sondage indiquaient : 59 % de « bénéficié », 24 % de « pas bénéficié » et 17 % de « ne se prononce pas » (Eurobaromètre - Bénéfice de l'adhésion).
  8. En mars 1991, les résultats du sondage indiquaient : 59 % de « bénéficié », 25 % de « pas bénéficié » et 17 % de « ne se prononce pas » (Eurobaromètre - Bénéfice de l'adhésion).
  9. En mai 2007, les résultats du sondage indiquaient : 59 % de « bénéficié », 30 % de « pas bénéficié » et 11 % de « ne se prononce pas » (Eurobaromètre - Bénéfice de l'adhésion).
  10. En 2010, les résultats du sondage indiquaient : 50 % de « bénéficié », 39 % de « pas bénéficié » et 11 % de « ne se prononce pas » (Eurobaromètre - Bénéfice de l'adhésion).
  11. Le parti a atteint 26,9 % des voix en 1999.
  12. Le parti a atteint 15,9 % des voix en 1999 (le parti n'ayant participé qu'aux élections en Flandres, le pourcentage concerne la population flamande).
  13. Le parti a atteint 2,4 % des voix en 1999 (le parti n'ayant participé qu'aux élections en Wallonie, le pourcentage concerne la population wallonne).
  14. Le parti ne s'est pas opposé à l'adhésion de la Bulgarie à l'Union européenne, cependant son positionnement politique en font un parti fortement eurosceptique.
  15. Le parti était, à l'origine, contre l'adhésion de l'Estonie à l'Union à l'instar du parti de l'indépendance.Cependant, seul ce dernier parti souhaite le retrait de l'Estonie de l'Union.
  16. Le parti a obtenu 9,8 % des voix en 2009, contre 0,5 % des voix en 2004 (Le Figaro - 7 juin 2009).
  17. Le parti « La politique peut être différente » est parfois qualifié d'eurosceptique modéré.
  18. Bien qu'étant plus eurosceptique que ces homologues européens, le parti soutint le traité de Lisbonne.
  19. Le parti a obtenu 1,48 % des voix aux élections de 2001.
  20. Le parti a obtenu 31,71 % des voix aux élections de 2001.
  21. La base du parti travailliste est plus eurosceptique que l'élite du parti.
  22. À la question « D'une manière générale, pensez vous que le fait pour la Macédoine de faire partie de l'UE serait… ? », 56 % ont répondu « une bonne chose », 16 % « une mauvaise chose » et 25 % « une chose ni bonne et ni mauvaise » (Eurobaromètre 2013, p. 69).
  23. À la question « D'une manière générale, pensez vous que le fait pour le Monténégro de faire partie de l'UE serait… ? », 55 % ont répondu « une bonne chose », 17 % « une mauvaise chose » et 23 % « une chose ni bonne et ni mauvaise » (Eurobaromètre 2013, p. 69).
  24. À la question « D'une manière générale, pensez vous que le fait pour la Serbie de faire partie de l'UE serait… ? », 39 % ont répondu « une bonne chose », 21 % « une mauvaise chose » et 31 % « une chose ni bonne et ni mauvaise » (Eurobaromètre 2013, p. 69).
  25. À la question « D'une manière générale, pensez vous que le fait pour la Turquie de faire partie de l'UE serait… ? », 38 % ont répondu « une bonne chose », 31 % « une mauvaise chose » et 21 % « une chose ni bonne et ni mauvaise » (Eurobaromètre 2013, p. 70).
  26. À la question « Tout bien considéré, estimez-vous que la Macédoine bénéficierait ou non de son appartenance à l'UE ? », 64 % ont répondu « bénéficierait », 25 % « ne bénéficierait pas » et 11 % « ne sait pas » (Eurobaromètre 2013, p. 70).
  27. À la question « Tout bien considéré, estimez-vous que le Monténégro bénéficierait ou non de son appartenance à l'UE ? », 61 % ont répondu « bénéficierait », 25 % « ne bénéficierait pas » et 14 % « ne sait pas » (Eurobaromètre 2013, p. 70).
  28. Historiquement, le kémalisme a soudé l’État turc après la chute de l'Empire ottoman lors de la guerre contre la Grèce. L'Europe et la Grèce sont ainsi perçues comme étant contre les bases de la politique nationale.
  29. À la question « Tout bien considéré, estimez-vous que l'Islande bénéficierait ou non de son appartenance à l'UE ? », 57 % ont répondu « ne bénéficierait pas », 33 % « bénéficierait » et 10 % « ne sait pas » (Eurobaromètre 2013, p. 70).

Références

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Voir aussi

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Bibliographie

Ouvrages

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Articles académiques

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  • (en) Liesbet Hooghe et Gary Marks, « Sources of Euroscepticism », Acta Politica, Palgrave Macmillan Ltd,‎ (ISSN 0001-6810, lire en ligne)

Articles de presse

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  • (sl) Aljaž Pengov Bitenc, In varietate concordia, (lire en ligne)
  • (is) « Meiri vinnu, lægri skatta og heilbrigðari stjórnmál! », Sjálfstæðisflokkurinn,‎ (lire en ligne, consulté le )
  • Élise Massicard, « L’Europe est séparatiste ! ou les avatars du discoursde l’unité en Turquie », CERI,‎ (lire en ligne)
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  • (en) « Montenegro Is Divided In Opinion about its European Future », Euinside,‎ (lire en ligne)
  • « Serbia's goal is not EU membership », Tanjug,‎ (lire en ligne)

Articles connexes

Liens externes